Alors que son dernier documentaire « Mrs. Fang » (方绣英) a été récompensé du Léopard d'or au dernier Festival de Locarno et qu'il vient d'être diffusé sur Arte, c'est un autre documentaire de Wang Bing, « Argent amer » (苦钱) qui se voit distribuer dans nos salles la semaine prochaine.

Pour ce documentaire le réalisateur a suivi de très jeunes travailleurs migrants partant du Yunnan (云南), une province à l'extrême-sud de la Chine, pour aller travailler à 2 500 kms de chez eux, dans le Zhejiang (浙江). Là-bas les attendent foison de petites échoppes de confection et d'ateliers dans lesquelles ils vont devenir des petites mains. Repassage, couture, emballage, tout y passe avec horaires éreintants à la clé et salaires incertains. Wang Bing nous plonge une fois au plus près de ses compatriotes, en s'intéressant à ces fourmis de l'économie chinoise. Le réalisateur est resté deux ans aux contacts de ces jeunes travailleurs à Huzhou (湖州) près de Hangzhou (杭州), et en tire un film de plus de deux heures et demie, sur leurs espoirs, leurs déboires et tout simplement leurs vies. 

A Huzhou les travailleurs migrants vivent dans des conditions sommaires, le portable permet de rester en contact avec une femme restée au village ou simplement la famille à qui on promet de rentrer bientôt. Selon les scènes le réalisateur semble pour une fois présent aux cotés de ses protagonistes, ils l'interpellent, le prennent pour témoin, comme un proche. Wang Bing a dit se sentir avoir été perdu dans cette ville, comme étranger, peut être en est-ce la raison. Une jeune fille lui montre son village natal sur son portable, des liens se sont créés.

L'une des premières séquences du film accompagne ces jeunes à bord d'un train qui au bout d'un périple de 38 heures les amène à destination, au fil du voyage et des parties de cartes entre deux voitures, du bruit répétitifs du chemin de fer, les regards deviennent lourds, les têtes tombent mais le réalisateur va continuer de filmer tout ce petit monde parti vers l'inconnu, et là le regard devient bienveillant, ces jeunes gens deviennent innocents, un peu les enfants de Wang Bing, un peu les nôtres.

 

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